Homard
Violet - Ohm Art Violant
Par Thierry UBERTI
Le 9 septembre 1997 rendez-vous était
pris avec Mister Gaurdon himself, figure emblématique de la musique
contestataire lyonnaise. Le but de cette rencontre était de faire un
petit flash-back de trente années, là où notre illustre
agitateur sévissait déjà. Avant de connaître les
prémices de sa longue carrière laissons-le d'abord nous recadrer
l'environnement:
" Le début des années 60 à
Lyon c'était d'énormes bandes "de jeunes" s'identifiant
à des quartiers. L'ethnie des États-Unis,
la bande de la Croix-Rousse,
celle du Tonkin, la pire "le
Tonkin" était à l'époque un quartier populaire de Villeurbanne
frôlant le bidonville, abritant en son sein le marché aux puces
de la place Rivière, les flics n'y risquaient pas un pieds la nuit-
Ces bandes pouvaient compter jusqu'à cent individus du genre "blousons
noirs", composées de merdeux de 12-13 ans jusqu'à
des "croulants" de 26-30 ans. Elles s'affrontaient lors des "vogues"
(fêtes foraines) de la Croix-Rousse ou de Perrache,
en d'incroyable bastons généralisés.... À chaque
bande correspondait un orchestre, un par quartier, le Tonkin c'était
par exemple le style Vince Taylor, les États-Unis
admettons Hallyday, la Croix-Rousse Eddy Mitchell,...,chacun
avait un style musical et vestimentaire, toute une ambiance....Le centre de
Lyon avait lui aussi ses ersatz, costards satinés
et beaux amplis, Si certain jouaient sur des postes radio trafiqués,
les "bourges" avaient leurs groupes qui reproduisaient
des trucs à la Shadows bien aseptisés, souvent
sous la férule de professeurs de musique . Mais là je te parles
de ceux qui tournaient, de ceux que l'on pouvait voir au West Side
Club où s'organisait chaque semaine un concours entre deux
groupes, entre deux clans, vous devinez comment ça pouvait finir....Voici
la situation jusqu'en 1964-65 "
-"Dans un soucis de ne pas être pris au sérieux on a longtemps
hésité entre un nom comme "Les Griffons"
(nom d'une marque de chasse d'eau) ou "Les Guitares d'Acier Bleu",
enfin on a opter pour le dérisoire... ce sera le "HOMARD
VIOLET".
-"J'ai toujours aimé la notion d'ensemble pas de groupe. Le Homard
Violet n'était pas un groupe de rock mais un ensemble musical.
C'est la notion qu'on en avait et on aimait bien faire chier en le précisant
! Les gens disaient les Homards Violets quand ce n'était pas ironiquement:
"les crevettes roses", on laissait dire, mais pour nous c'était
le Homard Violet ! Ça pince et le violet n'est-il pas la couleur des
morts par asphyxie, une couleur suicidaire quelque part....comme Hara
Kiri pour un journal, tout çà assez étudié".
Leur premier vrai contrat est à la MJC Laennec, où
ils succèdent aux "Tigers". À cette
époque la tendance est de moins en moins "rock" et de plus
en plus "Beatles", le Homard Violet tend vers quelque chose de plus
élaboré musicalement. Jusqu'à fin '63
ce n'est qu'un petit groupe qui répète sur la scène de
la salle des fêtes du Moulin à Vent
(1ère prestation à la fête scolaire du quartier.),
transportant son matériel: Guitares qu'il a fabriqué, Ampli/poste
de radio, en bus ou à pieds par tous les temps, c'est l'époque
d'apprentissage, d'initiation en faisant des reprises genre Chaussettes Noires
. Rien ne restera de cette époque, "Ça devait être
monstrueux!". J.C. Gaurdon a déjà sévi dans trois
groupes avant les Homards Violets avec lesquels il connaît une première
dissidence. Le 5-12-63 et va jouer avec "Les
Lowens" (Mon initiation à ce que pouvait être une
concession à l'aseptisé) dans ce lieu mythique qu'est le West
Side Club. Les Lowens sont un groupe bien "propre" avec un professeur
d'accordéon, Mr Pujol. "Je lui ai passé une trentaines
de chansons (J'étais déjà prolixe) composées et
enregistrées sur un magnéto Philips à bande, c'était
tout du mal digéré, du ressassé, j'aurais du mal à
reconnaître ces enfants que l'on ne m'a jamais rendus".
Fin '63 début '64, les Homards Violets
abandonnent leur initiation "Yéyé", fini les textes
et le style "Twist-rock pour surboums, régurgité et niais".
La formation se stabilise autour de J.C.
Gaurdon' (chant), Yves Argant (accompagnements), Serge Chaillou (solo), Baby
Benamed (batterie). Dans les répétitions ils
se rendent vite compte (comme beaucoup de groupes) que chacun à tendance
à surenchérir au niveau des décibels et ils instaurent
l'élaboration des morceaux à la guitare sèche avant
de passer aux instruments et à la recherche du son. Au même moment
Gaurdon prend des cours de chant avec Renée Mayoud.
"J'avais compris que le chant n'est pas un don mais un talent qu'il faut
travailler".
Ses influences sont alors diverses, ses maîtres sont déjà
Screamin' Jay Hawkins et Brassens, Colette Magny qu'il considère
comme la plus grande chanteuse française de Blues, Boris Vian,
Elek Baksik "au doigté de guitare incroyable", Prévert,
Pierre Henri, (pas commun à l'époque ) Les autres membres
sont plus dans les tendances du moment, Beatles et Stones, ce qui implique
quelques discussions. "On se posait des questions. Il y a deux types
de musique, celle qui s'entend et celle qu'on écoute. Nous on voulait
être écoutés, ne serait-ce que pour les paroles. Mais
on voulait un équilibre entre les paroles et la musique. On en parlait
longuement, je nous revois assis en bas des immeubles de Mermoz
à imaginer ce que serait la musique actuelle. On l'imaginait basée
sur les sensations, déstructuré, non asservie à une rythmique,
on avait déjà la conception de la musique contemporaine humoristique.
Notre but était de déstructurer la musique, de casser ses rythmes
pour que les mecs ne puissent plus danser, et tout cela présomptueux,
sans culture (dressage) musicale ! ".
De plus en plus le Homard Violet s'affirme comme un ensemble avec une philosophie
que Gaurdon s'efforcera de peaufiner avec le temps. Il aime
à souligner qu'ils sont un des rares groupes à composer et orchestrer,
le seul à Lyon. Pas de reprises ou alors une adaptation,
ne pas refaire comme les autres. "Certains font des morceaux mais qui
sont les mêmes que machin, j'appelle ça du clonage. On était
catalogué groupe de rock depuis longtemps mais on était déjà
un groupe dissident, aussi bien dans les paroles que dans les thèmes
employés. Je t'ai parlé de Colette Magny, c'était
notre côté engagé, Brassens la chanson
qui se réécoute, tu fais attention à tout ce que tu écris
pour que dix ans après tu trouves encore des jeux de mots, même
trente ans après.....Je ne peux pas renier Eddy Mitchell,
ni Hector avec qui je partageais le même impresario,
il était un succédané de Screamin' Jay Hawkins
avec des textes de Jean Yanne, ah! Jean Yanne, comment provoquer
sans en avoir l'air tout en ayant l'air. Un maître dans la façon
d'exprimer la provocation. Et Prévert, Henri Salvador, Ray
Charles, Chuck Berry, Baudelaire dont j'ai porté en musique
certains vers bien gras, j'ai ouïe beaucoup de Blues et un peu de Jazz....Mais
ça ne veut pas dire pour autant que je n'écoutait ni les Beatles
ni les Stones ! Personnellement j'ai apprécié
les Beatles à partir de "Help!", puis "Sgt Pepper"
bien sûr".
Les Homards Violets gagnent un concours à la MJC des États-Unis
qui leur ouvre les portes du studio "J.B.P.". Pour
le disque ils gardent l'esprit et les structures qui les caractérisent,
ils enregistrent deux titres, "Vision Spatiale
Spéciale" et "Liberté". Plus
ou moins cinq copies sont pressées(!), la suite ne se fait pas immédiatement
étant donné qu'ils doivent la prendre à leurs frais.
En '65, changement de soliste avec Charlie Di
Gaetano, mais ils n'ont toujours pas de bassiste, "on
en trouvait pas d'assez bon". Charlie faisait soliste en picking, se
qui ne se faisait pas en France, c'est ce qu'a donné Dylan par exemple.
Vers Pâques, à l'occasion d'une émission sur la MJC
Laennec, FR3 diffuse??? (ou tout du moins filme) une première
version du "Sadique".
Après avoir nettoyé les vitres de la nouvelle cité universitaire
(INSA) tout le mois de juillet ils se payent leur premier voyage en Angleterre
(août '65) accompagnés de Jean
Jacques "Epsy" Hel qui sera plus tard après
avoir sévit dans le Homard soliste de "Alain Bert et Epsyband"....
A ce propos beaucoup de musiciens passés dans le Homard Violet ont
continué, avec diverses fortunes, Di Gaetano a par exemple joué
dans un autre groupe lyonnais les "Midjets",
a accompagné Hector.
Le groupe n'a jamais été fermé même si la base
est toujours restée la même, c'est à dire Gaurdon,
Argant, Baby.
En Angleterre ils jouent au fil de leurs rencontres, au hasard
des pubs. Ils découvrent autre chose. Ils mettront à profit
aussi ces voyages pour se faire un peu "d'argent de poche", un coup
avec un trafic de boots, une autre fois avec des amplis Vox qu'ils déplombent,
donc qui ne marchent pas, et replombent une fois en France....
Le 5 février 66, une deuxième dissidence amène Gaurdon
à aller participer à un radio-crochet accompagné
par les Sphinx.
Certains membres des Homards Violets doutent
de ce qu'ils font et veulent s'orienter vers quelque chose de plus Stones
ou Beatles...." Je ne voulais pas de ce clonage. Mais il y avait cette
tendance à vouloir faire ce qui se faisait. Je sentais qu'ils avaient
l'impression qu'on allait mieux les aimer en faisant ça. Pourtant on
faisait ce genre de trucs en répètes. Ils doutaient...Sur scène
tout allait mieux vu que tout se passait bien, mais entre temps ils n'avaient
jamais la preuve que ce qu'ils faisaient était bon. C'est pour ça
que je suis allé faire ce radio-crochet, c'était en quelque
sorte un défi, une provocation, ils pouvaient ainsi voir de l'extérieur
ce que ça pouvait donner! Peut être avaient-ils quelque part
raison en désirant se rallier à la meute".
Les Sphinx sont un autre groupe mythique lyonnais, avec Alain Forestier
au chant. Gaurdon et lui composeront une dizaine de chansons dont on retrouve
"Je hais les mystiques" sur le CD du
Skizo Frenetick Bande "Laissez
des traces".
"...Inclassable j'ai toujours eu du mal à tourner, en faisant
du bal tu tournes toutes les semaines. Actuellement tu fais de la techno tu
as des contrats à longueur de journée, mais du Brassens accompagné
au synthétiseur avec une chanteuse d'opéra noire...., là
je crois que tu vas avoir du mal, même si c'est très bien. On
te dira toujours, ouais c'est excellent ce que vous faites, mais...., je ne
saurai pas comment l'annoncer. Il faut l'étiquette ! Pour moi la meilleure
étiquette c'est les ballots du Baloche ! Entre nous ce que l'on appelait
groupe de rock, c'était surtout du bal, ils jouaient pour faire danser
le Jerk !!!".
Le 20 avril '66, Gaurdon fait un passage radio à la
guitare sèche sur France 1 Lyon avec "Liberté".
C'est la période où ils trouvent enfin le quatrième pilier
du groupe, le bassiste Michel Cayrol
avec lequel Gaurdon rejouera jusqu'en 1984 !
Serge Chaillou fait son retour
comme soliste.
Cayrol avait été fortement incité par le batteur pour
venir les rejoindre, celui-ci montait tous les jours dans son bus en allant
au travail pour le harceler, ils garderont longtemps cette technique d'espionner
les autres pour récupérer les meilleurs . "On ne s'est
jamais planté dans nos choix !". Cayrol est à cette époque
le premier bassiste à avoir une basse Fender et à
savoir en jouer" (Les autres apprenaient par cœur leur basse en
l'écoutant au ralenti sur leur pick up) .
Le 25 juin 66, ils font la première partie
de René Louis Lafforgue, un grand de la chanson française qui
décédera un mois après. La prestation des Homards Violets
est écourtée par le maire de Lyon, Pradel.
"Je n'ai pas manqué de lui rebalancer dans les dents un jour où
il faisait la tournée des voix dans les MJC ! Je n'allais pas serrer
la main de quelqu'un qui m'avait écourté la vie. J'avais 19
ans et je l'emmerdais ce con".
C'est à ce moment que Gaurdon
commence à faire des concerts en solo, la manche à St
Jean avec Lavilliers, contact avec Higelin,
rencontre Colette Magny, il participe en vieux mécréant
aux messes Gospel du père Di Fatto...., ce sont des
prémices au mouvement "Beatnik". Le reste
du groupe lui reproche étrangement ses cheveux longs et son côté
négligé...Il est vrai que les Stones fleuraient bon le costard-cravatte,
bien propres sur eux. "Pour te dire les anglais me trouvaient destroy
par rapport à eux...! J'étais un dandy négligé
".
Août 66, "Mimile"
Argant, Baby, Gaurdon et Richard Weiss partent pour un deuxième
périple en Angleterre. Comme d'habitude ils ne se prennent pas la tête
et prennent au fur et à mesure ce qui se présente à eux.
"On était "l'exotisme" des anglais. Ils refusaient de
croire qu'en France des groupes puissent chanter en anglais des textes appris
phonétiquement sans en percevoir le sens. D'ailleurs le chanteur des
"Blue Bugs" a compris qu'il suffisait d'être
anglais en France pour tourner, pas besoin de savoir chanter. Il est resté
pendant deux ans et ils ont tourné comme des bêtes !". Le
6 août 66 ils donnent un concert dans
la banlieue de Londres que la presse locale ne manque de relater.
En septembre 66 Serge
est remplacé par Alain Cornet,
tendance gitan à la vélocité extraordinaire et une présence
qui a son importance. "Il faut avouer qu'il nous a sauvé la mise
à quelques reprises...Je me souviens de St Fons, le public avait décidé
de destructionner le groupe quel qu'il soit (tomates,...) . Moi avec mes peaux
de bête, cheveux aux épaules, ils n'avaient jamais vu ça
! Sur scène on avait des haches, là il faut que je précises:
La batterie avait toujours tendance à avancer, donc on mettait des
clous pour la bloquer et à chaque fois on nous prêtait des outils
que nous ne rendions jamais. Toute une collection (marteaux, haches,....)
dans une valise. Quand ça commençait à chauffer on sortait
tous nos ustensiles ! Donc à St Fons, des "loubs"
commençaient à nous insulter, tout naturellement je leurs répliquais
en leur montrant mon cul, à l'entracte on devait descendre par un escalier
côté scène. On nous attendait bien sûr, chef de
meute en tête, un "trims" en chemise blanche,
Alain qui lui entailla au cran d'arrêt provoquant un grand mouvement
de foule en arrière, l'incident fût clos. Par contre je ne t'expliques
pas le groupe qui devait passer pendant l'entracte, ils ont tout ramassé,
je me souviens du bassiste qui pleurait....Pour nous la suite s'est très
bien passée, il y en a même qui nous ont suivi partout .
Petit inconvénient, il avait tendance à faire le poing
avec ceux qui n'était pas des inconditionnels de Gaurdon'
Le Q.G. des Homards Violets était le café Le Lafayette.
On y trouve le groupe et tous les gens qui gravitent autour, peut-être
une cinquantaine de personnes. Pas une bande, ils n'ont pas d'appartenance
à un quartier, mais un mélange d'étudiants et de loubards
qui plutôt que de partir dans une délinquance violente se donnent
dans des délires surréalistes. Gaurdon n'appelle
pas encore ça des Happening. Ce sont des sortes de
gags, de mises en scène farfelues (40 personnes couchées sur
la route de Grenoble en pleine nuit, avec une lampe éclairée
sous le menton ou s'immobilisant sur une place à deux heure du matin
à la vu du moindre passage . Quand à déclencher les cloches
électriques d'une église en pleine nuit c'est à peine
s'ils osent... ). Tout ça est plus qu'une provocation "J'ai fait
la rue de la République en crucifié avec les autres en pèlerins
derrière, les gens ne savaient pas ce que c'était, ils ne comprenaient
rien".
Les répétitions des Homards Violets sont tout
aussi mouvementées, toujours pleines, tout le gratin musicos lyonnais
se succède, c'est un véritable spectacle, tout le monde se mêle
à des discussions sur la mise en scène....Ils n'ont d'ailleurs
jamais rien fait de caché, la recherche de son, les arrangements, chacun
y va de son petit truc, des bruitages avec générateur de son,.......Il
faut avouer que sur scène ils ont des tendances bizarres, entre le
bassiste qui joue dans un placard, le soliste dans un fauteuil,...., ils ne
font jamais ce que l'on attend d'eux. Tout est pensé, même les
"costumes", rien n'est laissé au hasard. Le Homard Violet
est un ensemble qui bosse autrement qu'en répétant, il fait
de la recherche, des expérimentations....
Mais c'est toujours le même problème qui resurgit, la direction
à prendre? "Mes frangins me servaient de sous-marins, ainsi je
savais ce qui se concoctait en mon absence. Je savais par exemple que
tel ou tel jour ils allaient essayer un nouveau chanteur et bien sûr
à chaque fois j'étais présent. Je ne me privais pas de
les casser jusqu'au jour où Jean-Claude
est arrivé, et là, j'ai dit oui. Je me suis très bien
entendu avec lui, normal, il savait chanter".
Ils se mettent alors à faire un mitigé de "bal-attraction"
qui leur permet de tourner d'avantage. Gaurdon n'est pas spécialement
opposé à ça, mais il les avait senti prêts à
prendre n'importe quel "ringard". Il comprend leur désir
à vouloir être un groupe "normal" et vouvoir faire
du Beatles, Stones et consorts...
"La plupart des gens, surtout les musiciens, préfèrent
l'égalité des goulags et des clones à l'insécurité
de la liberté et de la création. Ne pas savoir où tu
vas est vachement plus insécurisant que de dire on va faire le
morceau de... Eux croient que ça marchera, mais ça ne marche
jamais étant donné que le modèle existe déjà
en mieux. Enfin ils n'étaient pas tous comme ça, heureusement
parce que je n'aurait jamais pu fonctionné et je serais devenu
fou....".
Ils font le BAPSO '67 de l'INSA avec Claude Luter,
Jacky Mallerey et les Carlbury, un autre groupe de Lyon qui fait
beaucoup de reprises et qui tourne pas mal comme le groupe de bal Jimmy
& les Kingbees. Le BAPSO a l'avantage pour les Homards Violets
d'être bien payé ce qui les aidera à financer le disque.
Le 6 janvier '67 ils font la première
partie d'Eddy Mitchell et jouent "Priez pour
St Germain des Prés" qu'un illustre inconnu chante aussi
(J. Higelin). Gaurdon est littéralement porté
en triomphe par les africains du public à travers toute la salle du
Palais d'Hiver, "C'est un moment qui ne s'oublie pas, musicalement j'ai
toujours été nègre".
On arrive à l'enregistrement du (second) disque sur JBP, dont la sortie
se fait en février '67. Ils le produisent eux-mêmes voulant tout
maîtriser du début à la fin. "On avait confiance
en personne".
Très peu de groupes lyonnais sortent un disque, et le fait que les
Homards Violets gagnent de l'argent les a beaucoup aidé pour aller
en studio. "J'ai toujours été étonné que
des groupes jouent gratuitement comme si leur musique ne valait rien, ils
se privent de pouvoir investir sur l'avenir. Si tu n'investis pas sur
toi personne ne le fera, ou alors si quelqu'un le fait c'est mauvais signe
ça risque de te classer vulgaire/commun. Il est rare qu'un mec se dise
tiens c'est original, ça n'existe pas donc ça va se vendre.
La plupart du temps le ringardbiz dit: "Ok! Coco c'est comme j'aime,
fait slaper la basse il parait que cela fait vendre.". D'ailleurs beaucoup
de groupes lyonnais se sont plantés, prends Ganafoul
et Factory, l'un est Status Quo l'autre les Stones, mais
ça existait déjà dans les bacs, donc ils n'allaient de
toute façon pas vendre plus qu'eux ! Au bout du compte ils sont restés
un ersatz pour les français. Quand ils se sont aperçus trop
tard qu'ils devaient chanter en français la place était
déjà prise par Téléphone et Trust.
Et pourtant, je pense qu'ils étaient techniquement meilleurs. Donc
il faut toujours investir dans sa créativité. Sans gagner d'argent
tu ne peux pas prouver ton existence et personne ne peut se dire, c'est intéressant
ce que vous faites, on va investir dessus".
L'enregistrement se fait sur un deux-pistes, une pour les instruments et l'autre
pour le chant, sauf pour "Le sadique"
qui est en prise directe. Les arrangements sont donc limités, les bruits
que l'on trouve sur scène comme les filles qui hurlent à la
"Jack the ripper" de Screamin' Lord Sutch, la scie,
la deuxième voix,...,tout ça ne peut être enregistré.
"Le clodo" est en fait composé
avec Epsy (non-crédité sur le disque) pour le texte du premier
couplet Gaurdon' l'adaptant sur une déformation de "Tobacco
road" avec une basse jazz. Plus tard il constatera une certaine
similitude dans "La fille du Père Noèl" de
Dutronc....L'intro à la guitare qui rit, plus impressionnante
sur scène que sur le disque, deviendra similaire dans "My
friend Jack".
L'horreur au quotidien étant un de ses thèmes favoris, il compose
"Le sadique". Une deuxième version figure sur le CD: "Survie
et Morsure De Scène" et même une troisième serait
en train de se mettre en oeuvre.
"A l'époque les gens ne comprenaient pas un mot comme masochiste,
les expressions comme parano arrivent seulement dans les années
'70 en même temps que la vulgarisation de la psychologie. Tu disais
à un mec "t'es paranoïaque" il ne comprenait pas. Par
contre sadique il comprenait ! C'est une forme de provocation, il y a des
éléments que tu comprends et d'autres pas, mais avec l'histoire
tu en perçois le sens".
"Existentialisme année 66" peut
être la devise de Gaurdon, du nihilisme, du j'm'en foutisme, pour être
plus clair rien d'étonnant à ce qu'il crée plus tard
l'expression "Rien à cirer" pour sa chanson:
"On en a"
Quand à "Décolonisation"
c'est une des rares chansons engagées où Gaurdon s'identifie,
ce qu'il ne fera plus trop...."Comme dirait Brassens
je préfères suggérer que dire. Quoique sur le disque
rien n'est vraiment dit.
Quelques imitations ricanantes dans le chant ("....et de ça moi
je m'en fous"==> Eddy Mitchell,..va-t-en, tire-toi==>
Antoine ) dont il se délecte....
Au studio tout se passe très bien avec Jean
Baptiste Piazzano, ils sont très bien compris dans
leur recherche de son. Piazzano connaît parfaitement la musique, il
est d'ailleurs excellent pianiste.
Qu'est-ce qu'on a pu rigoler ensemble, ils m'a fait découvrir
les trucs les plus ringards de Lyon, il m'a fait écouter des trucs
incroyables,...."
La pochette est commise par un dessinateur autrichien Dieter
Volroff. "Aujourd'hui on se rend mieux compte ce qu'elle
représente mais à l'époque, l'oeil qui coure, la scie,
la femme enfilée, personne ne devinait, l'effet pointilliste diluait
l'idée, comme quoi l'oeil se forme comme l'oreille. Il faut pas oublier
que l'on était majeur à 21 ans et tenus dans un état
d'infantilisme. C'est peut-être pour ça qu'il y a eu
mai '68, on s'est dit mais ça ne va pas, on était des
gamins à 20 piges ! ".
Pour le dos de la pochette ils choisissent une photo devant le palais de justice.
L'éclectisme des poses et des vêtements défini parfaitement
l'esprit Homard: (De gauche à droite) Jean-Claude, Michel Cayrol, Gaurdon'(au
fond), Baby Bénamed, Alain Cornet, Yves Argant, ils payent eux-même
le photographe (Non crédité).
Piazzano tient à ce que J.C. Gaurdon
soit inscrit avec le nom du groupe, "au départ on ne voulait que
Homard Violet? (comme une interrogation)".
Dans un premier temps le disque est pressé à cent exemplaires,
tous vendus en deux mois ! Après un mois d'attente un repressage de
cent autres copies est fait, financé cette fois-ci que par Gaurdon
et Epsy (?), les autres n'y croyant pas vraiment.(Se contentant de
cette preuve d'existence.) ..Il s'apprête à connaître le
même succès mais....c'était sans compter sur un léger
contretemps militaire. Enfin, cinquante copies sont vendues à
Lyon. "Je me déplaçais dans la limite de mes moyens, sans
voiture, je me bougeais pour le placer, radios,.... Cent exemplaires c'était
énorme ! Les groupes faisaient à ce moment cinquante exemplaires
pour les potes et la famille, ils ne tournaient pas...Nous en quatre mois
tout a été vendu". Gaurdon n'est pas le seul à croire
en son disque, Piazzano a même présenté les bandes à
Barclay qui les a refusé catégoriquement. "Piazzano
croyait énormément en nous et en Los Chacos qui a fait un succès
avec "El condor passa", il a été très déçu
par la réaction de Barclay, il était tellement
persuadé qu'on était le groupe qui allait dévaster la
France. On a carrément été censuré, par les radios,
par le refus de distribution,....".
Après cette "censure" les Homards Violets prennent en grippe
l'enregistrement et décident d'en rester là, ce qui sera un
tort. "Je regrette maintenant parce que je n'ai rien hormis le disque
de cette époque. Le jour où je me suis acheté un deux
pistes ça a tout changé mais c'était bien plus tard...Par
contre avec les Homards on avait la chance d'avoir deux électroniciens
dans le groupe ce qui nous a permis d'être les seuls à avoir
une sono Teppaz qui étaient bien supérieur
aux Selmer vendues en magasin. Il me semble bon de préciser que pour
la scène l'invention de la table de mixage n'était pas encore
effective, la balance se faisait en direct des amplis. Grâce à
eux on testait tout, ils ont d'ailleurs travaillé dans le plus grand
magasin de Lyon et de France. C'était de la musique en gros, il commandait
des orgues en Italie qui transitaient par la Hollande pour les taxes douanières
(?!?)...., et on se fournissait tout notre matériel dans le "déclassé".
Lors des transports il y avait toujours du matériel détérioré
que les assurances remboursaient, ça nous permettait d'avoir des instruments
moins chers...".
Après le refus de Barclay de les produire ou de les distribuer,
la bêtise qu'ils font est de ne pas aller voir ailleurs. Mais Piazzano
a l'habitude de travailler avec lui et puis c'est toujours le même problème,
sans moyen de locomotion et mineur comment aller démarcher les
gens en dehors de Lyon ?
Dans la foulée ils doivent faire la première partie de
J. Brel, mais cette censure leur donne mauvaise réputation.
On les empêche donc de jouer tout comme Los Chacos
(?!)."Brel avait soi-disant reçu des bonbons empoisonnés,
nous étions censés être des provocateurs et monsieur avait
reçu des menaces...J'ai toujours douté de ces fameux bonbons,
je crois qu'il était plutôt en train de faire la promotion de
ses adieux. Ils avaient même censuré Los Chacos qui faisaient
de la musique péruvienne...! J'en ai profité pour lui faire
des grimaces , j'était vraiment énervés, lui était
sur scène avec ses étudiants de médecine qui organisaient
la soirée, et qu'il conviait à venir le rejoindre, alors
si quelqu'un avait voulu le faire sauter.....".
Le club de la "haute", le "Jams", les invite à
venir animer chaque semaine leurs soirées. Ils peuvent y répéter
et surtout y jouer pour de l'argent. "On y était tout le temps
fourré alors qu'il y avait deux mondes. Eux c'était le gratin,
tu pouvais te tirer la fille d'un général ou d'un curé,
et eux s'encanailler la luette à domicile.., mais bon ça n'a
pas duré longtemps".
Ils font la première partie d'Antoine. Il faut avouer qu'on les voit
plus souvent dans les MJC, notamment avec un boxeur, Maurice Tavant, mais
c'est l'époque du "music-hall". Les spectacles à multiples
facettes sont courrants, groupes de rock, jongleurs. Ils fréquentes
aussi "Le Wait and See" et "Le Cyclo" (où la condensation
refaisait tomber de la voûte en pierre la sueur des danseurs en flaques
sur les toms de batterie).
Août '67, c'est le troisième voyage
pour l'Angleterre. Il y a toujours Gaurdon, Argant, Richard Weiss et "Epsy"
Hel. Ils vont en Écosse où Gaurdon se souvient d'un pub : "Ça
a commencé par un gag, on jouait du folk français, puis on s'est
mis à faire de la musique répétitive avec des compositions
de Epsy (Chi-A-Nar) et les miennes (Les
Pendus Pendent Aux Paternes) auxquelles les écossais on participés
énergiquement créant une hystérie collective, des vieux
tapaient contre les murs avec les verres,...,il faut y avoir vécu !
Puis ça a continué dehors, on est sorti chez les gens, tout
le monde suivait....".
Le retour en France est moins gai. Il commence pourtant bien puisqu'on leur
propose une tournée nationale. Un club vient de se monter à
côté de leur salle de répétition "La
Jasse" et le patron leur propose d'aller jouer dans ses autres boites
dans toute la France. Ce sont des lieux très branchés où
habituellement seuls des groupes anglais passent. Le problème,
c'est la feuille de route en bêtises armées que vient de
recevoir Cayrol ! Dans un premier temps ils se mettent en quête d'un
bassiste, mais aucun n'ai apte à s'adapter...Les roqueux ne savent
pas jouer, les jazzeux se méfit pas encore près pour la fussion.
Du coup ils devancent leur appel ce qui leur permettra au moins de se retrouver
en même temps. Seul Baby qui est algérien continue de jouer en
essayant de garder vivant le Homard Violet, puis il part en Algérie
où il tente quelques trucs musicaux...Son retour en France est tragique,
il se fera faucher par un camion en portant secoure à un accidenté
de la route.
Pour leur départ à l'armée, un concert mémorable
est donné en plein air à la MJC de Gerland.
Patrick "cactus" Garel est au piano (Il deviendra
le batteur du "Chico Magnétic Bande", puis fondateur de "Sphéroé").
Pour l'occasion ils amènent armes , pistolets d'alarme (c'est de circonstance
!), pour un feu d'artifice ......et puis c'est le départ pour 16 mois.
Gaurdon en profite pour vendre les dernières copies du EP qui du coup
se dispatche dans toute la France. "Sans cette putain d'armée
on aurait encore certainement repressé le disque qui se vendait bien,
j'étais un des rares à croire en ce que je faisais, j'avais
la conviction ! Barclay n'avait pas cru en nous, je ne l'ai jamais compris
! On se disait qu'en étant les meilleurs à Lyon on allait venir
nous chercher, et rien...Maintenant tout était trop tard, l'armée
était là et nous enlevait une tournée nationale ".
Pendant ces seize mois Gaurdon compose énormément, s'efforce
de travailler le chant, le théâtre, un peu la guitare. "En
fait j'ai toujours joué sur celles des autres. On m'en prêtait
une pour faire la manche mais je n'en ai jamais joué avec les
Homards Violets. La première électrique que j'ai eu c'est vers
trente ans, à un concert où l'on était rémunéré
en instruments".
Fevrier-Mars '69, le retour. Epsy, Argant, Gaurdon
et sa compagne Michelle s'installent en communauté à Caluire.
Ils voient surtout l'aspect pratique pour la musique. Ils se construisent
une salle de répétition à la MJC de Gerland et tentent
de renouer avec l'esprit du Homard Violet. Ils s'aperçoivent que cette
séparation a malheureusement créé un décalage.
Les tendances, elles aussi, ont changé .Il n'est plus question de refaire
les "vieux morceaux", les musiciens, eux retournent à leur
vice, le "clonage". C'est une période cruciale pour le groupe.
"Alors que l'époque semble ouverte à toutes les expériences,
nous ne sommes sensiblement pas à la même vitesse. Ce qui
est marrant de souligner aussi, c'est que dans les années 60 il y a
une forte notion de groupe, ce sont des années très créatives
ce qui est paradoxal vu que la plupart des groupes ne faisaient que des reprises.
On parle des années '70 comme étant fantastiques, mais il n'y
a plus cette notion de groupe, ce ne sont que des solistes (Beatles se
séparent, Mothers==>Zappa, Hendrix,...)".
Pendant ce temps la MJC de Gerland devient le creuset des
mouvements créatifs. Il y a la musique avec les Homards Violets et
Pulsard (sorte de Pink Floyd), le théâtre avec la compagnie de
Bruno Beuglin, du No-art,...., il s'y passe énormément
de choses. Les Homards Violets tournent, mais quelque chose est cassé...."
A la fin je ne me rappelle même plus tous les instrumentistes qui ont
joué avec nous. On avait notre sono, l'orgue, ce qui nous permettait
de choisir l'organiste et de le virer s'il ne convenait pas...On a aussi eu
un saxo, il fallait que l'on change dans quelque chose de plus élaboré".
A l'aube des années '70, le Homard Violet n'a plus de raison d'être
et chacun prend une direction qui lui semble la bonne ou qui lui est plus
appropriée.
Quelques questions à Gaurdon ....
Comment a débuté ton apprentissage de la musique
?
Dès 8 ans tous les radio-crochets auxquels je participais je les gagnais.
J'avais très vite compris comment fonctionne le public, il suffit que
tu fasses un peu marrer les gens, les distraire, ne jamais mépriser.
Les gosses il ne faut jamais les faire monter sur scène
ils n'en redescendent pas...
Je faisais le mur pour participer à ces concours. J'ai toujours composé,
déformé des chansons existantes. Mais je n'ai jamais voulu être
chanteur de rock ou une vedette, pour moi il n'y avait pas de rock. Dès
l'enfance je savais que j'étais bon par constat. A 15 ans ça
me permettait de frimer avec les filles. Je n'ai jamais chercher à
réussir sachant me situer.
J'ai longtemps cru que tout le monde pouvait très bien chanter, mais
ne le faisait pas parce qu'il avait d'autres pôle d'attraction plus
sérieux, c'est beaucoup plus tard que je me suis rendu compte de l'attrophie
vocal de beaucoup, que les gens chantent faux parce qu'ils écoutent
faux, même les musiciens. Ce que je ne savait pas faire, pas con, je
l'ai appris.
Te considérais-tu comme le leader des Homards Violets ?
Le Homard était un ensemble de fortes personalités, chaque membre
avait ses compétences et s'occupait de son domaine, le batteur les
contrats, un autre le matériel,..., il n'y avait pas de "chef".
Moi je faisais le pseudo-leader sur scène parce que étant devant
pour chanter. Ce qui était une organisation assez rare chez les groupes
!
En gros à quoi pouvait se résumer la philosophie
du Homard Violet ?
Le cynisme (chien) de Diogène, celui qui montre et ricane. N'être
dépendant de rien ! L'outil de travail aux musiciens. Échapper
aux producteurs incultes qui ne peuvent pas s'empêcher de changer une
note, un texte, de placer leur entourage pour se donner l'impression d'exister.
Des musiciens on eu honte de leur disque après un tel traitement. Je
n'ai pas franchement le sens de la concession, surtout avec n'importe qui,
sur n'importe quoi. Ce que je cherchais c'était des requins à
grandes dents, pas des sauriens vaseux, glauques, arriviste mais médiocre.
Imagine moins de sourds et de mal comprenant dans la musique. À l'usage
tu t'aperçois que le vrais business est fait par les musiciens, et
le show par les frimeurs, gourmettes plaquées or et poudre au nez qui
te méprisent parce qu'ils ont le mauvais goût dans la bouche,
vivant comme des morpions des reste de la distribution anglo saxonne.
La frime c'est juste un travail... pour la scène !!!
Donner le meilleur au public parce qu'il a payer.
Deux personnes importantes dans ta vie musicale, tout d'abord
Zappa?
En '67 un mec me dit : Je viens des USA il y
a là bas quelqu'un qui fait ce que tu fais. Avant d'en être un
admirateur, ma première réaction a plutôt été,
"merde, il y en a un qui fait la même chose que moi ???".
Maintenant je perçois bien le parallèle dans notre carrière
quand aux motivation et à l'esprit, sauf que Zappa a toujours été
un sublime orchestrateur perfectioniste avec des musiciens qui sont des musiciens,
alors que nous on apprenait, lui avait compris l'importance vitale de controler
l'enregistrement lié au temps et de tout gardé, il était
plus techniquement plus mûr que moi.
Hector?
On a jamais su beaucoup de choses sur Hector, sinon que fils de riche il avait
décidé de ruiner sa famille, en tout cas il avait de sacrés
musiciens, Pierrot Fanen entre autre. C'est dans ses concert
que le sens du mot spectacle (spectaculaire) prenait tout son sens. Il m'a
visuellement beaucoup influencé. A l'époque il n'y avait pas
beaucoup de gens marrants dans le rock, maintenant non plus d'ailleurs.
Les Homards Violets et la drogue ?
Pas de drogue, un peu de fumé . Le problème a pu être
la boisson, on a d'ailleurs du en virer un, tu ne peux pas être bourré
et assurer sur scène ! Autrement certains se sont drogués pour
être dans mon état, qui était somme toute un état
normal....
Le punk ?
Mais en '67 on était déjà dans une notion de punk, de
déstructuration , d'ailleurs "Existentialisme"
est une notion de punk, de no-future. Autrement le punk je me souviens avoir
dit alors que c'était une mode pour relancer le marché du 45t,
il n'y avait plus que du 33t à rock-stars, rien pour les groupes moyens.
Je suis passé quelque fois en télévision, à la
moindre connerie c'était coupé. Alors on ne me fera jamais croire
qu'on peut dire "J'encule la reine" en direct sur une scène
de téloche, ça ne peut être que prémédité
! Ils me font rire, je n'y crois pas. Qu'après on les entubent et ne
les paient pas .....
Comment peut s'expliquer la "réussite" locale
des Homards Violets ?
Je pense qu'on était aimé parce qu'on avait un humour assez
destroy. J'ai par exemple chanté "Le sadique"
dans une salle où il n'y avait que des paralytiques, les gens me disaient
"mais tu vas pas chanter ça", alors que les handicapés
étaient hyper contents d'entendre quelqu'un qui n'était pas
en train de se larmoyer sur leur sort...On était un groupe populaire,
du peuple, on ne cherchait pas à faire intello, on avait pas de mépris.
Une sorte de pré-Mai 68, mais plus drôle.
Même chose pour commercial, je veux être commercial mais je ne
veux pas être mauvais, je pense que ça se vendra parce que ce
sera bon ! Je ne ferai jamais rien pour que ça se vende. Dans le showbiz
ils sont trop méprisants, "on va faire ça y vont aimer",
je ne sais pas qui ils voient avec ce "y vont" ???
Quand tu fais de la scène tu vois si ça marche ou pas.
Il y a toujours des gens qui portent un intérêt à
votre musique, tu le ressens comment ?
C'est vrai des titres du EP ont été repris, "Le sadique"
aurait été fait par un groupe punk en '78 mais je n'en ai aucune
trace (aidez-nous...!?!), "Décolonisation" par un groupe
antillais en '87, "Le clodo" par un groupe de gamins en '91,...et
puis il y a une compilation qui vient juste de sortir un de nos titres (Il
Sont Fou Ces Gaulois N°2) je crois. Concernant les droits des disques
de cette époque, il ne faut pas oublier que les gens qui faisaient
parti de ces groupes sont maintenant boulangers ou charcutiers, alors.....J'aurais
juste aimé être avisé ou recevoir ce disque, je ne cherche
pas à récupérer quoique se soit, j'aurais même
pu fournir des photos car celle que l'on trouve dans la revue "Juke Box"
et dans le livret de cette compilation n'est pas des Homards Violets. Serais-je
le Trotsky de la révolution Rockn'Roll?
C'est encore plus surréaliste, Le dérisoire j'aime....
Dans les années '80 tu avais en projet de sortir un livre
sur le rock lyonnais ?
Ce devait plutôt être une analyse ethnologique du rock lyonnais,
avec la collaboration de Piazzano et de tout ce qu'il pouvait posséder
comme documents, bandes, ...Ca devait se faire à l'université,
le président nous avait donné son accord, la bibliothèque
municipale était prête à faire une exposition, et ça
devait sortir comme un mémoire avec des illustrations,....C'est le
Machin du Patrimoine qui a refusé de nous allouer un budget, parce
que la problématique était mal posée.
Dans ce que tu fais aujourd'hui, que reste t'il du Homard Violet
?
Sur mes CD on retrouve des morceaux que j'avais déjà à
l'esprit à l'époque, mais que les Homards Violets ne comprenaient
pas. Beaucoup de titres n'avaient pas été enregistrés
parce qu'il était difficile de faire comprendre ce que je voulais,
la plupart étaient des plans entre "hard rock" et "Rythm
n'Blues" alors on faisait quelque chose de presque pareil mais avec plus
une tendance "rock". "Vampire blues" a par exemple été
composé en '67, j'avais dans l'idée de finir le morceau en arrêtant
les instruments les uns après les autres pour ne laisser que la voix
et la batterie...."Silence des années '70" est un titre symbolique,
c'est la fin du Homard Violet......Ta conclusion sur la période "Homard
Violet" ?
Soyons honnête, c'est l'armée qui nous a foutu en l'air. Dans
la logique des choses j'allais produire, trouver des distributeurs, j'allais
bouger, on partait déjà dans le principe de faire une tournée.
C'est vrai aussi que les choses vieillissaient beaucoup plus vite à
cette époque, et en '69 à notre retour, ce que l'on faisait
en '67 était vieux, dépassé, rock'n'roll, alors que l'on
pétillait dans le psychédélisme....
Mais quand je serais célèbre je me vengerais.
On peu retrouver le 45 tr "Homard Violet" en fantôme plage
14 du CD du Gaurdon' Skizo Frénétick Bande:
"Laisser Des Traces"
De même Sur Le CD : "Survie Et Morsure De Scène"
les titres suivant viennent de l'époque Homard Violet
-4-Vampir Blues
13-Entrepreneur De Pompes Funèbres
15 Plus Dingue Que Mes Rêves
18-Cône Métalick
19-Je Domine Le Monde
20-Quand Un Curé
21-Seul Pour T'Identifier
Georges"Gaston" MOREL (bassiste)
Si vous possedez des documents ou des informations, voir une autre vision sur le Homard Violet.
Photos en 360 dpi si possible
Angleterre 1965